Les sept merveilles du monde
Triste que les anciens ne t'aient jamais connue
Ils adoraient Diane d'Ephese aux mille seins
S'ils t'avaient, comme moi, devant eux, toute nue
Ils leur préfèreraient à coup sûr les deux tiens
Khéops, Képhren et le petit Mykérinos
Ont choisi des tombeaux, tous d'un moche achevé
Moi je préférerais, pour enterrer mes osses
La courbe pyramide que forme ton nez
On me parle parfois, et souvent avec fièvre
De ces fameux jardins flambants, à Babylone,
De mille étoiles mais, quand je suis à tes lèvres
Suspendu, pour moi, c'est là que la Vie rayonne
Et ce roi de Carie, ce cher monsieur Mausole
Qui dort dans un tombeau à trente six colonnes...
Sûr que s'il me voyait dormir sous tes guiboles
La jalousie rendrait le pauvre mort aphone
Les marins de jadis, quand la mer menaçait
Cherchaient dans le noir le phare d'Alexandrie
Je n'ai besoin que de tes pupilles de jais
Pour trouver mon chemin dans la plus sombre nuit
Le monde saluait le colosse de Rhodes
Peau de bronze qu'alors on croyait éternelle
Aujourd'hui qu'Hélios depuis longtemps s'érode
C'est ta douce peau qui me donne l'étincelle !
Zeus le barbu géant tutoyait les orages
Et commandait au temps de sa voix inflexible
Je jure pour ma part, jusqu'à la fin des âges
N'obéir qu'à ta voix, pur cristal invisible !
Les anciens ont pu voir les merveilles du monde
Je ne les envie pas une seule seconde
Parce qu'eux ne pourront voir ce moment subtil
Où je sens dans tes yeux l'univers qui vacille
Le feu d'une bougie, éphémère et sublime.