Morrigan

Elle se plante en haut d'une colline et regarde sa vallée. Son regard caresse le moindre recoin de cette nature qu'elle connait par cœur. Comme chaque jour, elle sort un de ses fifres de son étui de cuir, s'assoit en tailleur, et lance des notes de vie dans l'air. Comme toujours, elle jongle avec les sons et les atomes de la vallée, s'harmonise avec eux, s'osmose dans leur atmosphère.
Le son parcours tous les sentiers et va réveiller la forêt, jusqu'au dernier insecte dormant sous une fougère. L'âme de la forêt monte dans les cimes et les fait tanguer d'impatience. Le Soleil, sentant que son tour est venu, ose un rayon timide au-dessus des montagnes.
Ce rayon frappe la musicienne. Le son du fifre frissonne, comme un glaçon caressé. L'onde parcourt toute la forêt.
Regardez-la fermer les yeux pour mieux sentir le son de son instrument ricocher sur tous les troncs, tous les rochers de la vallée. Elle déborde de musique. La vie doit sortir. Chaque matin c'est pareil, la vie doit sortir par la musique.
Une octave au-dessus. La musicienne passe tout entière dans son bout de roseau.
Le chant du bois se mêle au frêle instrument. Un son grave, une vibration presque imperceptible.
La terre s'étire, sereine.

Mais aujourd'hui n'est pas un jour comme les autres, et la musicienne le sait.
Au loin on entend des grognements,
des cris,
des rages insanes.
La nature sent cette approche néfaste.
Le tambour résonne dans la vallée.
Tous les esprits montent dans les arbres défendre la vibration de vie.
La musicienne se cale sur le rythme du tambour.
Le fifre s'endiable,
et la forêt remue.
La nature part combattre,
le fifre joue toujours.

Quand résonne le tambour,
Dans notre grande bataille,
N'oubliez pas d'écouter
Le fifre de Morrigan

Comments

[Un Korrigan]

C'est ce que les Allemands appellent "la fureur de fifre"...